Prison de Kondengui : pourquoi le régisseur a été remplacé en catimini

Publié le par Bobby

Conjectures sur les raisons du départ de Jonas Tiwa.

 

Par Christophe BOBIOKONOcbobio@gmail.com

 

La mutation s’est faite en douce, sans tambour ni trompette. Samedi dernier, le vice-Premier ministre chargé de la Justice, Amadou Ali, a mis un terme au bail de Jonas Tiwa à la tête de la prison centrale de Yaoundé-Kondengui. Un mouvement du personnel qui s’est limité à un chassé croisé entre deux administrateurs de prison. Daniel Njieng, jusque-là régisseur de la prison de Bamenda, a été désigné pour succéder à M. Tiwa à Yaoundé en lui cédant son poste dans le Nord-Ouest. L’installation du nouveau patron de « l’université » de Kondengui s’est déroulée trois jours plus tard, mardi 09 août 2011, sous la présidence du Délégué régional de l’Administration pénitentiaire pour le Centre. Avec une célérité inhabituelle et quasiment dans la discrétion…

La nomination et l’installation du nouveau régisseur sont intervenues à un moment où l’actualité est relativement bouillante dans cette prison. Depuis plus d’un mois, en effet, certains prisonniers sont coupés de visites. Le 29 juillet 2011, par exemple, l’ancien Secrétaire général de la présidence de la République, Jean-Marie Atangana Mebara, accusé de détournements de deniers publics et incarcéré dans cette prison, avait refusé de poursuivre les débats dans le cadre de son procès au motif d’être interdit de visites. Depuis trois semaines, avait-il précisé, les membres de sa famille et ses amis n’étaient plus autorisés à accéder à l’intérieur du pénitencier. Mais cette situation, qui n’a pas encore trouvé une solution, était due à une manœuvre procédurale contestée du juge d’instruction chargé de son dossier (lire par ailleurs). Le refus de M. Atangana Mebara de poursuivre les débats en audience en protestation de la violation de ses droits de prévenus est-il à l’origine du départ de M. Tiwa ? Il est difficile de l’attester.

Raisons de sécurité

Des sources administratives internes à la prison de Kondengui font état de ce que, ces dernières semaines, un malaise n’avait de cesse de prendre de l’importance dans les rangs des pensionnaires de l’établissement, du fait notamment de la gestion des cas de maladie. « Certaines requêtes pour le suivi médical des prisonniers hors de la prison restent parfois des semaines sans réponse, souvent pour des cas très délicats », explique sous anonymat un fonctionnaire de l’administration pénitentiaire en poste à Kondengui. « En même temps qu’on donne l’impression d’être très rigoureux sur certains aspects de la vie des prisonniers, on montre trop de laxisme sur certains autres aspects », renchérit un autre, qui estime que « la situation pouvait devenir explosive à tout moment, notamment du fait du sentiment de deux poids, deux mesures qui s’est installé dans l’esprit de certains prisonniers ».

Les raisons de « sécurité » sont parfois évoquées pour expliquer la mutation intervenue à la tête de la prison centrale de Kondengui en cette période dite « délicate » d’avant-veille d’une élection présidentielle... Ces raisons ont notamment trait aux communications des prisonniers avec l’extérieur. Dans le pénitencier de Kondengui, alors que certains pensionnaires disposent, au vu et au su de tous, de leurs téléphones portables, les moindres faits et gestes des autres sont épiés avec la plus grande minutie. La publication, en début de semaine, des échanges de messages (obtenues dans des conditions à élucider) entre certaines membres du gouvernement (sortis ou en fonction), certains chefs d’entreprises et des prisonniers, apparaît comme le dernier acte de « lâchage » de M. Tiwa.

Au ministère de la Justice, certaines sources laissent penser que Jonas Tiwa avait perdu la confiance de ses chefs, « pour avoir abrité à la prison, dans son propre bureau, un conseil de la famille Fotso ». C’était le 09 juin 2011. Dans le procès-verbal de la rencontre organisée par Victor Fotso, ses enfants dont Yves-Michel Fotso et un notaire au sujet d’un contentieux domanial, M. Tiwa était désigné comme témoin. C’est cette liberté qui aurait été à l’origine de sa disgrâce, même s’il ne se retrouve pas sur la paille à la suite du mouvement de samedi dernier…

C.B.

 

 

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