Présidentielle : la Cour suprême précise les contours de la «déclaration de candidature revêtue de la signature légalisée»

Publié le par Bobby

Le défaut de précision légale, dont se prévalaient les candidatures invalidées par le Conseil électoral de Elections Cameroun (Elecam) pour prendre part à l’élection du 9 octobre prochain, a été comblé par la haute juridiction.

 

Christophe Bobiokonocbobio@gmail.com

 

Louis Tobie Mbida avait l’air bien dépité le 20 septembre dernier après la confirmation du rejet de son dossier candidature à l’élection présidentielle du 9 octobre 2011 par la Cour suprême siégeant comme Conseil constitutionnel. Le Conseil électoral de Elections Cameroon (Elecam) avait invalidé la candidature du président du Parti des démocrates camerounais (Pdc) au motif que sa déclaration de candidature, l’une des pièces du dossier, n’était pas revêtue de sa « signature légalisée ». M. Mbida estimait qu’il s’agissait d’un abus manifeste, raison du recours introduit à la Cour suprême. Devant la haute juridiction, le candidat du Pdc disait son espoir de voir la Cour suprême mettre enfin un terme à la loi des séries qui frapperait son parti : après la condamnation de son père, il y a 50 ans, par un greffier nommé magistrat pour la circonstance et le « refus » de la Cour suprême de faire droit à une requête du Pdc au sujet des fraudes électorales constatées lors du scrutin municipal de 1997…

Ces mots de Louis Tobie Mbida ont pesé de peu de poids devant la Cour suprême. Et pour cause : si la haute juridiction ne devrait pas se laisser aller au sentimentalisme comme l’a rappelé le Procureur général, Rissouck A Moulong, dans son réquisitoire sur un ton un tantinet moqueur, les arguments juridiques n’étaient pas favorables au président du Pdc. L’examen de son dossier de candidature par la Cour suprême, en pleine audience et à la suite de la lecture du rapport, a révélé que sa Déclaration de candidature n’était pas effectivement revêtue de sa signature légalisée. Mieux : M. Mbida avait légalisé sa signature le 9 septembre 2011, c’est-à-dire quatre jours après l’expiration du délai de dépôt des candidatures intervenu le 5 septembre en application des dispositions légales. Cette pièce versée au dossier par le candidat déchu lui-même, constituait la pièce à conviction que le Conseil électoral d’Elecam avait vu juste.

Cachet obligatoire

Il se trouve qu’un autre candidat, Benz Enow Bate, du Cameroon Democratic Party (Cpd), avait connu les mêmes déboires devant le Conseil électoral d’Elecam, pour le même motif et avait aussi saisi la Cour suprême dans le but d’obtenir la réhabilitation de sa candidature. Mais la réalité du dossier de M. Enow Bate paraissait bien différente de celle de Louis Tobie Mbida. Non seulement le candidat du Cpd a procédé à la légalisation de sa signature le 31 août 2011, c’est-à-dire dans les délais, mais aussi toutes les références de cette formalité sont signalées « à la cinquième ligne » de sa déclaration de candidature revêtue de sa signature, comme il l’a expliqué pendant l’audience. M. Enow Bate a aussi pris la précaution de joindre le Certificat de légalisation de sa signature à sa déclaration de candidature. Des précautions qui n’ont nullement infléchi la position de la Cour suprême, totalement convaincue que la signature revêtue sur la déclaration de candidature du candidat n’était nullement légalisée.

Avant de rejeter le recours du candidat du Cpd au motif qu’il n’était pas justifié, la Cour suprême s’est livrée à une sorte de pédagogie pour faire comprendre à l’auditoire ce que signifie « déclaration revêtue de la signature légalisée ». Le conseiller Clément Atangana, président de la chambre administrative de la Cour suprême, a expliqué que la légalisation de la signature se fait en deux étapes : d’une part, l’usager procède au dépôt de sa signature, en trois spécimens, dans un registre ouvert dans toutes les unités de police à cet effet ; et obtient un numéro en référence à cette formalité. D’autre part, pour donner le cachet de la légalisation de sa signature sur une pièce, l’usager doit repartir devant l’unité de police, qui atteste par un cachet et l’apposition sur la pièce en question des références du dépôt préalable de la signature en trois spécimens, que cette signature est légalisée.

Benz Enow Bate et son avocat ont paru peu convaincus par les explications des magistrats de la Cour suprême. Comme Louis Tobie Mbida, le candidat du Cpd était même déçu, d’autant, a expliqué son avocat, que la loi était muette sur la forme à donner à la déclaration revêtue de la signature légalisée. Mais, au-delà de la déception, l’arrêt de la Cour suprême (qu’on espère explicite) est venu combler un vide. En tant que juridiction suprême de l’Etat dont les décisions sont insusceptibles de recours, les motivations de son arrêt apportent désormais des précisions sur la forme de la formalité exigée aux candidats à l’élection présidentielle. Mais on peut déjà parier que la prochaine fois, comme pour le non respect des délais, certains candidats se feront encore prendre à la dernière minute par une disposition dont la Cour vient de fixer les contours.

C.B

 

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